Une nuit propice à la réflexion (libre)

La nuit était fraîche, mais pourtant un petit vent doux soufflait sur les toits. L'instant était propice à la détente, mais surtout à la réflexion, c'est d'ailleurs ce que faisait en ce moment même le très peu loquace Virgil. Habillé d'une veste noire très classe, d'un pantalon de même couleur et d'une chemise blanche, le tout donnait un résultat assez classe mais sobre.

La lune était haute dans le ciel et Virgil semblait dans son élément, le silence et la réflexion. Il était assis avec une lampe bougie. Cette lampe éclairait assez pour que Virgil puisse lire son livre. Un livre qui contenait des écritures étrange et il y avait peu de monde en ville capable de lire un tel livre avec autant d'aisance, peut être même personne. Mais lui y arrivait sans aucune difficulté en réalité c'était comme s'il connaissait ce langage depuis qu'il était né. Ce livre n'avait rien de spécial en réalité il contait une histoire d'amour entre une vampire et un hunter, une histoire remontant à la nuit des temps. Ce livre était bourré de morale redonnant espoir pour le futur, pour le futur de Secret Town. D'ailleurs il avait beaucoup apprit au sujet de cette ville grâce à ce genre de livre.

Cela faisait maintenant quelque temps qu'il était dans le camp des sorciers de Rosalie, il ne l'avait rencontré qu'une seule fois en fait, mais cela ne le gênait pas du tout, il se doutait que la demoiselle devait être très occupé. A gérer la situation et à garder les yeux sur les autres sorcier ainsi que sur les hunters et sur certain des personnes n'étant dans aucun clan. Ils n'avaient pas beaucoup parlés tout les deux mais il l'aimait bien. Il continua sa lecture quant un bruit se fit entendre. Virgil leva la tête scrutant l'obscurité de ses yeux tristes, il ne vit rien alors il reprit sa lecture.

C’était une nuit tranquille, une nuit à l‘air rafraîchissant et à la lune brillante, haut dans le ciel. Rosalie était restée toute la soirée enfermée dans le bureau qu’elle occupait souvent la journée, là où on pouvait la trouver, là où elle réfléchissait, là où elle s’entretenait souvent notamment avec Allistair, son second et ami d’enfance, au sujet d’une quelconque mission ou d’un quelconque projet. Ce soir-là, le jeune homme était venu lui faire un compte rendu des derniers jours passés, où Lilian et lui avaient tenté d’enseigner au plus grand nombre possible de Sorciers inexpérimentés le maniement de l’arme blanche, ou du moins les bases. Pour apprendre à se défendre, ne serait-ce qu’un peu, si jamais l’un d’entre eux devait se retrouver dans l’incapacité à se servir de son don. Rose était prévenante. Certes, la plupart de ces Sorciers n’arriveraient certainement pas à venir à bout d’un Hunter en ayant seulement pris une leçon de lancé de couteau, mais cela pouvait toujours servir. Rien n’était à confier au hasard, dans cette ville. Mais passons.

Allistair avait fini par prendre congé, si bien que Rosalie se retrouva seule. Songeuse, elle était restée un bon moment assise sur un de fauteuils qui se trouvaient dans la pièce spacieuse, ses yeux d‘azur rivés sur un point imaginaire à travers l‘immense baie vitrée. Elle réfléchissait, comme souvent. La certaine tranquillité qui s‘était installée ces derniers temps sur la ville était loin de la rassurer, elle lui paraissait plutôt de mauvaise augure. Le calme avant la tempête. Dans une ville comme celle-ci, dont les règles de vie étaient dictées par les aléas d‘un Conflit ancestral, ce ne serait pas vraiment étonnant. On était sur un immense château de cartes, ici, sans cesse détruit et reconstruit, mais qui n‘évoluait jamais véritablement. Les temps allaient-ils changer ? N‘avaient-ils pas d‘ailleurs déjà commencé à le faire, depuis que Rosalie s‘était affirmée devant le Conseil, il y avait de cela maintenant deux ans et quelques mois, presque trois ans ? Depuis que l‘ancien chef Hunter s‘était vu remplacé par ce fameux Drylen d‘Al Kersen, et que la guerre semblait se relancer avec plus d‘intensité encore ? C‘étaient de bonnes questions. Mais allez savoir, au bout du compte.

La jeune chef n‘aurait su dire avec exactitude quelle heure de la nuit il était, si elle était avancée ou non, quand l‘envie subite de prendre l‘air la prit. Avant cela, elle s‘était levée de son fauteuil, les pans de sa robe noire de coupe simple retombant à hauteur de ses genoux, pour s‘approcher du service à thé d‘argent et finement ouvragé qui trônait sur une table basse de la pièce, qu‘elle gardait depuis longtemps et qu‘elle affectionnait tout particulièrement. Elle s‘était servie une tasse de thé préparé dans la soirée, encore fumant, le même air pensif dessiné sur son fin visage, de manière gracieuse et méthodique. Puis une fois la tasse en main, elle s‘était redressée, ramenant ses longs cheveux blonds en arrière de l‘autre. Ce fut lorsqu‘elle en avala une première gorgée, douce et revigorante, qu‘elle posa ses yeux sur la lune, qui brillait dans le ciel, derrière la baie vitrée du bureau, et qu‘elle eut alors l‘envie fugace mais irrésistible de sortir à l‘air libre. Et heureusement pour cela, les Tours disposaient chacune d‘un toit où l‘on pouvait aisément se rendre pour trouver un instant de tranquillité ou observer le panorama qui s‘étendait à perte de vue.

La jeune fille quitta donc son bureau l‘instant suivant, sa tasse de thé légèrement fumante dans la main, pour traverser un premier couloir silencieusement, d‘une démarche souple et gracile, le son de ses pas étouffés par le tapis qui s‘étirait sur le sol. Buvant une nouvelle gorgée de la boisson, la jeune révolutionnaire emprunta bien vite les escaliers qui menaient aux étages supérieurs, et n‘eut pas à gravir énormément de paliers avant d‘atteindre la porte de service accédant au toit de l‘immeuble. Après tout, son bureau se situait dans les hauteurs du dit bâtiment, c‘était pratique. La porte qui s‘ouvrait produisit un léger grincement, mais Rose n‘y prit pas garde. Elle avait effectué quelques pas dans l‘ombre et refermé doucement la porte derrière elle lorsqu‘elle avisa une silhouette assise au milieu du toit, et qui s‘était retournée un instant. Néanmoins, cette dernière se détourna bien vite, la blondinette en conclut donc qu‘elle ne l‘avait pas vue. S‘approchant sans faire de bruits, hors mis peut-être celui de ses pas, Rose reconnut alors Fumeï. Virgil Fumeï, Sorcier solitaire qui partageait néanmoins ses idées, au don intéressant de décryptage d‘anciens langages. Elle n’avait pas eu l’occasion de lui parler très souvent, mais voilà qui pourrait être rectifié ce soir. Arrivant à sa hauteur, avisant la lampe bougie et le livre qu‘il lisait, Rose s‘arrêta alors et ouvrit la bouche pour prononcer d‘abord un doux et laconique :

- Bonsoir.

Pus sans attendre forcément de réponse, elle s‘abaissa pour s‘assoir à côté de lui, en tailleur, à même le sol. Elle posa un instant son regard pensif sur la lune, dans le ciel, avant de se tourner vers son vis-à-vis. Se rappelant qu‘elle tenait toujours sa tasse, elle leva légèrement la main dans la direction du jeune homme.

- Un peu de thé ?

Sa voix, comme toujours, était douce et posée, à l’image de son apparence.

Virgil fut tiré de sa lecture par une voix douce. Il leva la tête et vit son patron. Il n'avait pas beaucoup parlé avec elle, en même temps il ne parlait pas beaucoup, mais il trouvait qu'elle lui ressemblait un peu, toujours à garder ses sentiments enfouis en elle. Sauf qu'elle le faisait sûrement par devoir, alors que Virgil le faisait parce qu'il était comme cela. Il n'avait jamais été quelqu'un de très loquace et s'en était d'ailleurs énervant pour la plupart des personnes voulant avait une discussion avec lui. Bien sûr, il lui arrivait de parler et d'avoir de très bonnes discussions, mais c'était assez rare et cela se produisait surtout quand il était avec ses parents, il n'y avait qu'avec eux qu'il parlait normalement. Enfin bref, il regarda la jeune fille aux yeux azur, de ses yeux tristes et mélancoliques à lui. Lui-même ne savait pas pourquoi il avait cette expression dans les yeux.

La jeune fille lui disait bonsoir en toute politesse. Elle lui proposa même du thé. C'était bien gentil à elle de se soucier de lui comme cela, mais n'était-ce pas son rôle de s'occuper des Sorciers ? Peut être, mais sûrement pas comme cela, il en déduisit donc qu'en ce moment ce n'était pas Rosalie le chef des Sorciers, mais Rosalie la personne, qu'il avait en face de lui. Et que c'était pour cela qu'elle semblait si douce. La jeune fille était assez belle en réalité, habillée légèrement, les cheveux blonds, les yeux bleus, tout semblait léger et discret en elle. Et malgré le fait qu'elle soit sûrement très puissante, il n'émanait d'elle aucune malveillance ou aucune présence mauvaise, elle semblait juste être quelqu'un à part, d'une grande douceur. Peut être se trompait-il, il n'en savait rien en fait.

Bonsoir. Non merci pas de thé pour moi, je vous remercie.

Il aimait rester très poli, surtout devant une telle personne. A ce qu'il paraissait, elle avait un don en rapport avec l'électricité. Il n'en savait pas plus, on lui avait surtout dit qu'elle était très mature malgré son jeune âge, mais c'était bien normal, en fait. Aucun sorcier ne suivraient un chef qui ne serait qu'un enfant. Alors qu'elle semblait être une adulte dans un corps d'adolescent, c'était très perturbant en réalité. Comment se comporter en face d'une telle personne ?

Cette nuit est idéale pour prendre un bol d'air frais ne trouvez-vous pas ?

Le sorcier décrypteur lui retourna tranquillement son bonsoir, avant de refuser poliment son offre. Rosalie abaissa donc le bras, posant nonchalamment sa main refermée autour de la tasse tiède sur une de ses jambes. La brise, légère et fraîche, venait caresser la peau, douce et agréable. C‘était une belle nuit, vraiment. Difficile de s‘imaginer que l‘on vivait dans une ville où le carnage, le sang et le combat primaient, lorsque l‘on était ainsi au calme, n‘est-ce pas ? C’était sûr. D’ailleurs, à côté d’elle, Virgil prenait la parole, pour lui demander de sa voix posée si elle ne trouvait pas que cette nuit était idéale pour prendre un bol d’air frais. Sans regarder son vis-à-vis, mais les yeux rivés sur le ciel obscur, Rose esquissa alors un léger sourire. Il avait parfaitement raison.

- Si, idéale. C‘est le mot.

La jeune fille n‘était pas forcément du genre à s‘épancher continuellement en paroles qu‘elle jugeait souvent inutiles, préférant parfois le concis au brodé, le silence au bruit. Mais ce fameux Fumeï, n’était-il pas dans ce genre également ? Apportant la tasse à ses lèvres, Rosalie tourna légèrement sa tête blonde pour poser son regard sur ce dernier, un instant. C’était un homme qui devait apprécier la solitude, qu’on savait peu loquace et plutôt renfermé. Mais quand on lui demandait quelque chose, quand on lui demandait par exemple de traduire un texte trouvé quelque part au langage inconnu, il ne refusait jamais. Quoi que l‘on pouvait en dire, quoi que l‘on puisse dire sur le fait qu‘il ne parlait pas beaucoup, qu‘il ne se confiait guère plus, Virgil Fumeï restait quelqu‘un sur qui l’on pouvait compter. Cela, c‘était sûr.

Avalant une autre gorgée de la boisson à la fois si douce et si revigorante, Rose leva une nouvelle fois ses yeux clairs sur le ciel, parsemé de quelques pâles étoiles. C‘était surtout la lune qui brillait le plus. Elle était vraiment belle ce soir. Le calme était paisible. Abaissant à nouveau la main qui tenait la tasse, l‘autre se posant sur le sol dur et froid de la surface du toit, Rosalie se tourna alors vers son vis-à-vis, songeant fugacement qu‘il n‘était peut-être pas forcément malvenu de continuer la conversation, même si l’autre Sorcier semblait d’abord occupé.

- Vous venez souvent ici ?

Pour lire ces livres qu’il était le seul à pouvoir lire ? Au calme, à la leur de la lune ? C’était sûr que c’était des plus agréable, des plus tranquille. Puis esquissant un nouveau sourire, compréhensif, la jeune chef ajouta, sur le même ton doux et posé qu’elle avait du naturel :

- Si jamais je vous dérange dans votre lecture, n‘hésitez pas à me le dire. Je comprendrai.

Evidemment qu’elle comprendrait, elle n’était pas si susceptible que cela. Non, elle était juste compréhensive, et soucieuse de préserver cette paisible tranquillité qui manquait parfois cruellement à beaucoup de gens dans cette ville maudite.

Quoi qu'il se passe, il était certain que Virgil aimait cette conversation. La conversation de deux personnes assez silencieuses peut paraître belle au point de vouloir la continuer plus longtemps. Il était rare que Virgil apprécie une conversation, mais c'était le cas même si son visage ne semblait pas éprouver cette émotion. En réalité c'est ce qui faisait son "charme" si l'on peut dire, son visage sans émotions et ses yeux qui reflètaient la tristesse. Avec lui, la citation "Les yeux sont le miroir de l'âme" prenait tout son sens, vu que ses sentiments, aussi faibles soient-ils, passaient par ses yeux. La lune éclairait les deux sorciers et Virgil sentait enfin un calme profond; peut-être que le calme passait aussi par la conversation, le dialogue et le partage ?

Même si cette ville ne se prêtait pas à ce genre de situation, ce n'était pas un problème pour le décrypteur. Temps que vous êtes au calme à l'intérieur de vous-même, des personnes peuvent bien se battre à côté de vous, vous serez toujours dans la tranquillité. C'est ce qu'il avait apprit après de nombreuse années à lire. Il réfléchissait comme cela, car il était impossible pour lui de mener un véritable combat par la violence, n'étant pas assez fort, pas assez entraîné et surtout n'ayant pas de don destructeur. Il avait finit par se dire que les mots et les paroles pourraient finir une bataille, à condition d'être patient, et Virgil l'était, bien entendu.

Il regarda la jeune fille à côté de lui et en la voyant le traiter avec une telle douceur et une telle gentillesse, il se dit qu'il avait bien choisit de la suivre. Après tout ne vaut-il pas mieux choisir un chef qui nous ressemble en certains points ? Pour Virgil, il était évident qu'il n'aurait pas choisit un patron violent ou encore excité. Mais cette jeune fille semblait pleine de sagesse pour son bas âge. Il faut le dire, ils avaient quand même 12 ans de différence et pourtant, il sentait qu'elle connaissait plus de choses sur la vie que lui, alors qu'il avait vécu plus longtemps. Cela forçait le respect.

Votre présence m'honore et de toutes façons, je pense avoir assez lu aujourd'hui. Je viens ici quant je le peux.

Chose exceptionnelle, Virgil ferma son livre, pour discuter, chose qu'il ne fait que très peu. Quand il discute, il ne ferme pas son livre, ou s'arrange pour ne rien lire à ce moment. Il plaça là son livre contre son torse, comme un enfant le ferait avec un trésor, regarda une nouvelle fois la jeune fille puis il dit :

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